Fandom: Supernatural.
Disclaimer: Rien n'est à moi.
Prompt: S'il était honnête envers lui-même.
Note: La suite. :'D
Bonne lecture!
Vice Versa - chapitre 2
D'accord, en sortant de la cave, Dean s'était enfui - plutôt lâchement, s'il était honnête envers lui-même, ce qu'il était le moins possible. Mais bon, c'était plus facile, là, d'être honnête envers lui-même, vu qu'on ne pouvait plus lire dans sa tête. Vu que c'était
lui, l'ange, maintenant.
AH. Un souci en moins.
Ou pas.
Car en effet, Dean avait compris tout de suite qu'en plus du corps de Cas, il avait hérité de sa Grâce. Difficile de l'ignorer, quand il s'était tourné vers l'ange et qu'il avait vu...
Qu'il avait vu...
Pas Cas dans son corps, non. Ou pas
simplement cela. Quand il s'était tourné vers Cas, pendant un bref instant, cinquante-sept centièmes de seconde (et ce n'était pas flippant du tout, que Dean connût le temps exact, non non non), il avait aperçu sa véritable apparence. Le temps d'un clignement de paupière.
Il avait vu une créature blanche, au visage effilé comme celui d'un cheval, sa toison majestueuse, ses membres osseux. Ses épaules avaient été larges, assez musclées pour supporter le poids de ses ailes, brunes et irisées à la lumière et magnifiques; des cornes d'antilope avaient orné sa tête, délicates et fines.
Et ses
yeux...
Ses yeux avaient été d'un bleu que Dean ne connaissait que trop bien, car il avait toujours transparu à travers les yeux de Jimmy Novak; toujours, toujours là, à bruisser sous la surface, à rappeler à Dean combien Castiel restait
Autre. Ce bleu pouvait tonner comme l'orage, déclencher une tempête,
anéantir tout un peuple s'il le souhaitait; ce bleu pouvait soigner, yeux ourlés de noir et d'une indicible douceur, azur vibrant et pur.
Et ce bleu, à travers le filtre de la Grâce de Cas, devenait soudain
déchiffrable, aussi clair que de l'eau de roche, aussi vrai qu'une molécule d'oxygène.
Et le sentiment qui brûlait dans ces yeux avait un nom
terrifiant.
Alors Dean avait cligné des paupières, vite, vite, cinquante-sept centièmes de seconde; et Cas avait disparu, ou plutôt, ou plutôt non, la
Vision avait disparu, Cas plus qu'un être grognon dans un corps qui n'était pas le sien.
Et Dean s'était dit, je n'ai rien vu, j'ai déliré, tout inventé. C'est la Grâce, c'est la
Grâce.
C'était rien. Rien du tout.
Et Cas était dans son corps, et c'était
terrible; à quels secrets pouvait accéder Cas dans son corps, quels souvenirs restaient scellés entre les cellules de sa peau?
Alors, Dean s'était enfui; terrifié à l'idée de voir du bleu à la place du vert en croisant le regard de Castiel.
Et arrivé dans sa chambre, il avait pris le temps d'inspirer à fond, chassant Cas de son esprit, et le monde avait explosé.
Saviez-vous ce que c'était, être un ange? Etre un ange, c'était respirer et connaître le nombre exact de molécules d'air que vous veniez d'absorber, là, maintenant, cette seconde. C'était connaître leur pureté, c'était savoir ce que vous veniez de respirer
d'autre. C'était marcher sur des atomes et connaître la pression exacte pour les faire
céder ou connaître leur origine à chacun, admirer leurs liaisons qui vous permettaient de tenir debout. C'était entendre les livres bruisser sur les étagères, rendus vivants par les âmes de ceux qui avaient apposé leurs mots entre leurs pages.
C'était trop voir, c'était trop entendre, c'était trop savoir. C'était
trop.
Et Dean s'était saisi la tête à deux mains, et désespéré d'une distraction, avait cherché à penser à autre chose.
Cas. Castiel. Comment devait-il se sentir, là, dans son corps humain et privé de sa Grâce? Aveugle et sourd et ankylosé, claustrophobe. Craquant presque ses cellules, débordant, proche d'étouffer.
Il devait avoir hâte de retrouver son corps; il devait avoir hâte de quitter le
plan humain et d'être de nouveau libre au Paradis.
Il devait...
Et Dean, en s'observant dans la glace : les cheveux stupides de Cas, sa mâchoire stupide, les yeux stupides de Jimmy Novak mais
pas ceux de Cas... n'avait plus supporté de lui ressembler, soudain, et avait défait le noeud de la cravate, retiré la chemise.
Il avait ouvert son propre placard pour prendre une chemise à lui, collant son nez dessus pour sentir son odeur. C'était stupide, ok? Et un peu flippant. Et il
puait : son odeur était un mélange de cambouis, de cuir et d'alcool. Son odeur était celle du musc, de la transpiration et de l'herbe coupée. L'odeur de rosée des matins trop frais.
Et cela s'était produit là, en boutonnant sa chemise d'abord jusqu'au bout; puis en la déboutonnant un peu en apercevant son reflet dans le miroir, puis en se demandant quelle pouvait bien être l'odeur de
Cas... C'était là qu'il s'était retrouvé en bas, s'envolant sans même s'en rendre compte, attiré par l'objet de ses pensées.
Cas avait croisé son regard. Vert.
Un flash, et
bleu.
Et Dean s'était de nouveau retrouvé en haut, se cognant contre la commode et envoyant la bouteille de whisky posée dessus sur le sol.
xxx
xxx
Dean avait fini par redescendre, une moue mécontente sur les lèvres, s'efforçant de se faire le plus petit possible. Il portait toujours l'une de ses chemises, et c'était... étrange, de voir Jimmy Novak porter un vêtement qui était de manière si flagrante un symbole des Winchester.
Non, pas "Jimmy Novak": le pauvre homme était au Paradis depuis longtemps, tué la première fois que Castiel s'était fait tuer. Par sa faute.
Mais donc, voir le corps que Castiel avait fini par considérer comme le sien porter le symbole des Winchester, c'était... Cela rendait sa poitrine chaude.
Il aimait bien.
Sam plissa les lèvres, dans une mimique pas si différente de celle de son frère; cela fit sourire Cas. Que Dean ne fût pas dans son corps ne changeait absolument pas le fait que ces deux âmes étaient soeurs.
- C'est bon, Dean? On va pouvoir commencer les recherches sur le miroir?
Mais Dean ne semblait pas vraiment l'écouter; ses yeux partaient en tous sens, fusillaient les livres de la bibiothèque d'une manière étrangement acide, regardaient le sol ou le bois de la table avec effroi.
Et Castiel comprit. Enfin.
- ...Je suis vraiment, vraiment désolé, Dean. C'est ma faute.
Sam se tourna vers Cas avec inquiétude :
- Cas?
Mais Cas ne l'écoutait pas. En deux enjambées, il rejoignit Dean, saisissant son épaule gauche. Dean tourna ses yeux vers lui, battant des paupières lourdement, pas vraiment là :
- ...Cas?
Cas lâcha un juron très humain. Sam s'affola aussitôt :
- Qu'est-ce qu'il se passe? Qu'est-ce qu'il lui arrive??
Cas se concentrait sur Dean, ne quittant pas ses yeux.
- Dean. Regarde-moi. C'est "trop", pas vrai? Tu entends tout, tu vois tout, tu sens tout et c'est trop?
Dean se crispa sous ses doigts. Serrant les dents, il se força à hocher la tête. Cas plissa les paupières :
- Okay.
Attrapant Dean par la main, il l'entraîna vers une chaise, le faisant asseoir. Il s'agenouilla à côté de lui sans lâcher sa main.
Sam était toujours dans son dos :
- Cas, qu'est-ce que je peux faire?
Les yeux de Dean remontèrent vers Sam, et s'écarquillèrent un peu plus, son souffle se bloquant dans sa gorge.
Cas soupira. Il caressa les doigts de Dean de son pouce, attirant son attention :
- Dean, regarde-moi. Ne regarde que moi, d'accord?
Dean le fixait avec des yeux énormes, pupilles explosées; il réussit cependant à hocher de nouveau la tête, sa détermination habituelle brûlant dans ses iris maintenant bleus.
Cas resserra un peu plus sa main dans la sienne :
- Bien.
Il jeta un regard à Sam par-dessus son épaule :
- Ce sont les sens d'ange. C'est... un peu trop, pour lui. Je ne pensais pas qu'en plus de la Grâce, il les sentirait aussi. En tout cas pas comme ça. J'ai été stupide.
A ces mots, Dean serra sa main à son tour, fort, ses prunelles mécontentes. Cas lui sourit simplement, avant de regarder de nouveau Sam.
Sam soupira, souriant légèrement aussi. Il avait compris, bien sûr : Sam Winchester était loin d'être stupide.
- Ok, je vous laisse un instant. Je peux faire quelque chose d'autre?
Cas réfléchit :
- ...Eteins la lumière en partant. Cela ne changera pas grand-chose, il peut voir dans le noir, mais le moins de stimuli présents, le mieux ce sera.
Sam opina du chef. Il jeta un regard à Dean, ses mots adressés à Cas :
- Ca va aller?
Ce fut Dean qui répondit :
- Sammy, je mourrais pour toi, tu le sais, mais tu peux sortir un peu, là? Tu es un peu trop brillant pour moi.
Sam ouvrit la bouche; s'interrompit.
Il scruta Castiel, et ce dernier eut de nouveau l'impression d'être disséqué :
- Je vais avoir plein de questions à te poser. Tu le sais, hein, Cas?
Dean répondit encore, entre ses dents :
- Sammyyy... Tu joueras ton nerd après.
Sam lui tira la langue pour tenter de camoufler son appréhension, puis plongea la pièce dans le noir avant de la quitter.
Les prunelles de Dean luisaient dans l'obscurité, la Grâce crépitante :
- Comment je fais cesser ça?
Cas sourit :
- Concentre-toi sur moi.
XXX
A suivre.
Note de fin: Vous allez avoir la suite, ne m'en veuillez pas. :'D