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Abattage en carène

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Swato
Swato
Dieu vis sur une tortilla.
Messages : 1062
Date d'inscription : 08/08/2013

Abattage en carène Empty
MessageSujet: Abattage en carène Abattage en carène Icon_minitimeSam 30 Mar - 20:58

Fandom: Original
Prompt: Oh. C'était ça.
Résumé: Longue histoire mais en bref, Nour est un clandestin qui a embarqué sur le navire de Raphaël, le Blue Sentinel, pour échapper à l'expulsion en France. Ils ont sauvé des baleines puis ont eut une altercation avec un autre bateau, ce qui a poussé le Blue Sentinel a revenir en France. Sur le chemin, Nour et Raphaël tombent amoureux. Mais de retour au pays, Nour est saisi par la brigade de l'immigration et est renvoyé en Algérie. Voila voila.



Abattage en carène




Il n'avait jamais pris l'avion de sa vie, c'était une première. Le passager à coté de lui eut l'air amusé en le voyant s'accrocher à son siège au décollage tout en suant à grosses gouttes et en jurant comme un charretier. Le ciel : définitivement pas son élément. La seule chose qui lui revint en boucle pendant le trajet France-Alger, c'était que les deux moments à risques dans un vol, c'était le décollage et l’atterrissage. Le dernier fut au moins tout aussi effrayant et stressant que le premier mais il s'en tira vivant. Raphaël fut tenté d'embrasser le plancher des vaches en descendant de l'avion mais résista au cliché en éventant son t-shirt trempé de sueur.
Il alla échanger ses euros contre des dinars algériens et fit le tour de l’aéroport jusqu'à trouver une petite boutique qui vendait des cartes routières. Puis Raphaël sortit du bâtiment, s'assit sur le trottoir et fit ce que tout bon touriste paumé aurait fait à sa place : il se prit la tête entre les mains et se laissa submerger par la connerie de son manque d'organisation.
Prendre un taxi jusqu'à l'adresse qu'il avait noté à l'arrache sur un bout de papier lui coûterait un bras, qu'était-il censé faire ? Marcher ? Faire du stop ? Prendre le bus ? Raphaël retourna la carte dans tous les sens, il avait repéré la ville mais impossible de savoir où la maison de Nour se situait exactement. Son manège devait avoir l'air pitoyable, un homme eut pitié de lui en le voyant s'arracher les cheveux et lui demanda s'il avait besoin d'aide dans un français impeccable. Ne croyant pas sa chance, Raphaël lui colla sa carte sous le nez et lui expliqua son dilemme.
— Prenez le train, ça ira plus vite, lui suggéra-t-il.

L'homme lui indiqua le chemin de la gare, Raphaël le remercia et poursuivit son périple.


**


Un billet de train, deux correspondances et quelques heures plus tard, Raphaël arriva enfin à Biskra. Dans la même ville où habitait la famille de Nour. Avec sa carte routière et son sac sous le bras, Raphaël s'éloigna de la gare. Une pensée terrible se faufila sous son crâne et il ne parvint pas à l'en faire sortir. Et si Nour n'était pas rentré chez lui ? Et s'il avait préféré se cacher plutôt que d'affronter sa famille et de risquer un nouveau mariage forcé ?
— Qu'une façon de le savoir, marmonna-t-il pour lui même.

Raphaël suivit les rues en se référant à sa carte et admira les bâtiments très différents de ce qu'on voyait en France... Les tons jaunes, orangées et rosées, les peintures blanches et les volets couleur vert d'eau, la circulation du centre ville, les écritures en arabe sur les devantures... Il écouta le vrombissement sonore des voitures et des bus ainsi que les bavardages animées prononcées avec des « r » durs et des « l » tantôt traînants et tantôt secs. Raphaël se perdit dans le cœur de la ville, il essaya de demander de l'aide mais ses paroles ne trouvèrent écho en personne, il dut se résoudre à prendre un taxi. Nour avait été chauffeur de taxi, ça aurait été drôle de tomber sur lui par hasard, un peu comme si le destin les poussait l'un vers l'autre. Mais on n'était pas dans une comédie romantique, l'homme derrière le volant ne fut pas Nour et Raphaël remballa ses délires en levant les yeux au ciel.
Le taxi le déposa devant un immeuble jaune à la peinture écaillée. Avec son sac sur le dos, Raphaël examina le bâtiment en penchant la tête sur le coté puis relut le papier entre ses doigts. La poitrine comprimée, il déglutit, essuya ses paumes moites sur son jean et alla se planter sur le seuil du building. A gauche se trouvaient des étiquettes blanches avec des annotations arabes, peut-être des noms et des prénoms.
— Merde, grommela-t-il.

Raphaël eut beau plisser les yeux et tenter d'y réfléchir logiquement : il ne parlait pas un mot d'arabe alors en lire... Nerveux, il piétina sur place et inspecta les environs, à la recherche de quelqu'un ou quelque chose qui pourrait l'aider à y voir plus clair. Le premier passant qu'il croisa l'envoya paître, le deuxième ne parlait pas un mot de français et le troisième n'en avait clairement rien à faire de ses problèmes. Énervé et frustré par ses échecs à répétition, Raphaël se tourna vers les étiquettes et pressa chaque bouton en répétant inlassablement « Nour Zaidi » lorsque quelqu'un lui répondait. Là encore, les portes restèrent closes.
Lassé, il s'assit sur les marches et attendit.


**


Il profita de la sortie d'une dame pour entrer dans le hall de l'immeuble mais fut tout aussi démuni qu'à l'entrée. Il tenta bien de parler au gardien mais ce dernier ne fut pas ravi de trouver un étranger dans son hall, même s'il s'époumonait à lui expliquer qu'il était là pour rendre visite à un ami. A un plus qu'ami. Peut-être.
— Zaidi. Nour Zaidi, répéta-t-il.

Le gardien le remit à la porte et Raphaël leva les mains au ciel en soupirant. Il se percha de nouveau sur les marches. Il commençait doucement mais sûrement à détester ce pays. Raphaël contempla ses ongles rongés jusqu'au sang et se passa une main dans les cheveux. Peut-être que Nour ne vivait plus ici. Peut-être que la famille avait déménagé. Et lui, il était là à attendre comme un con. Dans son dos, la porte s'ouvrit mais il ne se leva même pas pour se faufiler à l'intérieur, il avait besoin d'une pause. Et d'un whisky mais il fallait qu'il se lève pour dégoter un bar dans le coin et il manquait d’énergie pour ça.
Un bruit de fracas lui fit jeter un coup d’œil par dessus son épaule. Son cœur se décrocha brusquement dans sa poitrine. Il atterrit sur ses pieds et se retourna en un quart de seconde, sans savoir vraiment comment. Devant lui, Nour avait reculé jusqu'à percuter la vitre dans son dos, ses yeux étaient écarquillés et il le regardait comme s'il avait vu un fantôme. Raphaël avait l'impression d'être possédé par un monstre d'anxiété et de fébrilité, sa gorge était serrée et ses lèvres eurent un tic nerveux, comme si elles ignoraient s'il fallait sourire ou pas. De tous les trucs ridicules qui lui passaient par la tête, tout ce qu'il trouva à dire fut :
— Tu t'es rasé.

Et effectivement, les joues de Nour étaient lisses, la barbe qui faisait des boucles près de ses oreilles avait disparu. Raphaël s'admonesta de son manque d'éloquence, sa bouche se pinça et il fit un pas en avant avec incertitude. Nour n'avait pas bougé et les émotions sur son visage ne cessaient de changer, lunatiques. Peur, surprise, tristesse, hésitation, de nouveau tristesse puis surprise encore. Raphaël prit une inspiration et plaqua un sourire en coin sur ses lèvres.
— Je fais tout le chemin depuis la France et t'as rien à me dire ?

Ses mots brisèrent enfin son immobilité, Nour renifla avec amusement avant de plaquer une main contre sa bouche et de complètement s'effondrer. Mort d'inquiétude, Raphaël posa une main sur son épaule et pencha la tête. Il eut le temps de voir les yeux de Nour s'embuer de larmes avant que ce dernier ne passe soudainement ses bras autour de sa nuque pour le prendre dans une étreinte si serrée qu'il en eut du mal à respirer. Ses doigts se crispaient si fort que Raphaël les sentait s'enfoncer dans sa peau même à travers le tissus de son haut, il referma ses bras autour de lui et se tut en entendant la respiration de Nour s'entrecouper.
Madha tafeal huna, ishtaqtu elaika, chuchota Nour d'une voix à moitié éteinte.

Le poids de son corps entre ses bras, de sa tête contre son épaule, sa voix, son odeur, le tremblement de ses doigts et même les mots dont il ne comprenait rien. Six mois d'absence et de recherches. Une seconde de nirvana.
— Tu m'as manqué.

Nour se recula et Raphaël fut de nouveau saisi par l'image qu'il renvoyait. Il posa une main sur sa joue, laissa son pouce tracer la ligne de sa pommette et sourit.
— Trois mois sur un bateau et je sais même pas quel âge t'as, t'as l'air si jeune sans ta fichue barbe.

En abaissant les paupières, une larme roula sur la joue de Nour et ce dernier s'empressa de la faire disparaître, en souriant dans un soupir. Le regard rivé sur Raphaël, il compta sur ses doigts, l'air perdu entre les chiffres et ce qu'il avait sous les yeux.
— Deux, cinq, dit-il.
— Deux, cinq, répéta Raphaël. Vingt-cinq ?

Les lèvres de Nour n'arrêtaient pas de sourire, il était encore un peu pâle mais le choc paraissait le quitter au fur et à mesure. Ses yeux marrons ne cessaient de faire des allés retours sur le visage de Raphaël. Jamais personne ne l'avait regardé comme ça de toute sa vie.
La réalité de la situation le heurta de plein fouet tout-à-coup. Nour était là. Il n'avait pas déménagé, il était revenu chez lui, il était juste là. Ils étaient en train de parler et ils se tenaient encore les bras.
— Oh... C'est ça, c'est réel, marmonna-t-il, submergé d'émotions.

Perplexe, Nour fronça les sourcils. Raphaël sourit:
— Je peux t'embrasser ?

Les yeux de Nour le lâchèrent une minute pour voyager autour d'eux. Ils étaient devant l'immeuble où il vivait, légèrement sous l’alcôve qui cachait la porte d'entrée, encore en public. Raphaël jura contre sa propre stupidité.
— C'est illégal ici, merde. J'avais oublié, fais comme si j'avais rien...

Nour se mit sur la pointe des pieds et le fit taire d'un baiser. Si l’accolade avait été troublante, il ne savait pas comment qualifier l'incendie qui faisait ravage dans ses terminaisons nerveuses à ce simple contact.
— … dit, termina-t-il en clignant des paupières.

Nour retomba sur ses talons et baissa le menton pour cacher son sourire. C'était tellement lui d'agir de cette manière que Raphaël secoua la tête, attendri et avide de combler les six mois de séparation.
— T'es adorable.

Raphaël se fit violence et recula d'un pas pour ne pas attirer l'attention sur eux. Il ne voulait pas les faire arrêter une deuxième fois, la première avait suffit. Nour se mordit les lèvres et Raphaël faillit envoyer valser tous ses principes.
— Avec certains membres de l'équipage, on est en train de monter un genre de cagnotte pour créer notre propre association. On est fauché pour l'instant mais...

Ce qu'il s'apprêtait à demander était dingue. C'était déjà fou de rechercher désespérément un gars qu'on ne connaissait que depuis trois mois, encore plus dément de faire le trajet France-Alger pour lui après six mois de silence radio. Nour aurait pu l'oublier, passer à autre chose. Pour tout ce que Raphaël en savait, il était marié maintenant. Qui s'accrochait aussi vite et aussi fort à quelqu'un en si peu de temps ? Raphaël apparemment.
— Ça te dirait de devenir un pirate avec moi ? Sourit-il.
— Mais... Je pas pouvoir, je expulser France, souffla Nour.
— Rien ne m'interdit de venir chercher un volontaire en Algérie...

L'espoir incertain sur les traits de Nour se transforma en euphorie, il enroula de nouveau ses bras autour des épaules de Raphaël et le serra contre lui.
Tbea akid.
— Tu sais que je parle toujours pas un mot d'arabe, j'espère, dit-il avec un petit rire.

Les épaules de Nour se secouèrent sous un rire, il se recula, les yeux brillants et un grand sourire aux lèvres.
— Oui, répondit-il.





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