Fandom: Original
Prompt: Tu es jaloux ?
LES DEUX L
Le papier se froissa dans ma main, je le lissai sur la table et relis rapidement pour être sûr que j'avais tous rempli et fournis les pièces nécessaires. Alice piétina à mes cotés:
— Allez, pose cette fichue feuille et on y va ! On va être en retard !
Je levai les yeux au ciel, pris un post-it et notai "signe ça, s'il te plait. Alice et Luke" avant de le coller à nos deux autorisations de sorties. Dans la voiture, une question me traversa:
— Tu crois que la mère de Liam va vouloir qu'il parte ?
— Je sais pas, répondit-elle après un moment d'hésitation. Il a des séances de psy, non ? Et comment il va faire avec ses cachets ?
Je haussai une épaule:
— On n-n-ne part q-q-que d-deux s-semaine.
— Ouais t'as raison... Mais s'il arrive quoi que ce soit ?
— C-C-Ca lui fer-rait du b-bien de c-c-changer d'air.
Alice tapota ma main avec un petit sourire, elle fit battre ses cils rapidement.
— T'es trop mignon, ronronna t-elle.
— Alice, grognai-je.
— Non vraiment ! Par contre si tu commences à parler de coucher de soleil, ou de chevaucher dans un pré avec une rose entre les dents, je te préviens: on va tout de suite chercher une corde.
— C-C-C'est un p-peu extrêm-me de se s-suicider p-p-pour ça, grommelai-je.
— Non non, tu te trompes sur toute la ligne: la corde c'est pour t'attacher et te mettre dans le coffre de la voiture où personne ne retrouvera jamais ton corps.
— Ah ah, fis-je semblant de rire. J-Jalouse ?
— Moi ? Jamais, je préfère mes coups d'un soir.
— S-Salope va.
— Espèce de romantique, rétorqua t-elle avec une grimace. Brrr, ça me dégoûte.
Au lycée, je retrouvai Liam à la pause, il était d'humeur égale bien que peu bavard. Une fois installé à la cafétéria, je me décidai à aborder le sujet qui fâche:
— T-T-T'as demand-dé à ta m-m-mère pour l-le voyage e-en Anglet-t-terre ?
— Ouaip.
Son visage s'assombrit, je me mordis la lèvre.
— Elle a d-dit non, devinai-je.
— Ouaip.
Je n'insistai pas. A l'autre bout de la salle, Alice m'envoya un regard inquisiteur, je secouai discrètement la tête, elle grimaça. Liam ne s'en aperçut pas, il fronça le nez et se passa une main dans les cheveux.
— Je me suis fait engueulé hier.
— Ah ?
— Ouais. J'ai piqué quelque chose à mon beau-père et ma mère m'a chopé.
— Q-Qu'est-ce q-q-que c'était ?
Ça ne me surprenait pas, Liam avait toujours eut la main qui traînait. Je savais parfaitement qu'il avait quelque affaires à moi, dont un de mes tee-shirt préféré à l'effigie de James Dean. Il fronça les sourcils et fouilla dans sa poche avant de sortir un tissus bleu avec une inscription jaune qui disait "Today is a good day" accompagné d'un smiley.
— Une c-cravate ? Souris-je.
— Hm.
— Liam... P-Pourquoi tu v-v-voles une c-cravate ?
— J'en sais rien, parce qu'elle est bizarre... Mais ma mère m'a chopé, elle a commencé à hurler comme si elle se faisait bouffer par un zombie. Mon beau-père a tout entendu et il me l'a filé. Ils se sont engueulés toute la soirée. Bref.
Il poussa un soupir et me la lança dessus, je la rattrapai tout juste.
— Tu peux l'avoir. Ça fait pas pareil.
— De q-q-quoi tu p-parles ?
— Je sais pas, répondit-il en secouant la tête, confus. De voler et de se faire offrir, c'est pas pareil. Garde-là.
La déception dans sa voix me laissa perplexe. C'était comme s'il aurait préféré que son beau-père ne lui offre pas la cravate.
— Il est g-g-gentil avec toi ?
— Gentil, répéta t-il en aboyant un rire. Ouais, trop même.
Un nouveau soupir. L'humeur égale de Liam prit un tournant sombre. Les sautes d'humeur me troublaient à chaque fois, brusques et rapides, c'était impossible de les prévoir. J'avisai la cravate et la passai autour de mon cou, un sourire accroché aux lèvres.
— Elle est b-b-bizarre, affirmai-je avec amusement.
La nouer par contre... Je tentai de faire le noeud sans y parvenir. Liam fit claquer sa langue contre son palet:
— T'essayes de t'étrangler avec ? Si c'est le cas, t'es sur la bonne voie...
— Je s-sais pas f-f-faire les n-n-noeuds de c-cravate.
— Donne-moi ça, abruti.
Liam reprit la cravate et la plaça autour de son cou, je prêtai attention à ses gestes pour pouvoir les reproduire mais fut rapidement distrait par son air concentré. Il me la tendit et me regarda la mettre autour de mon cou. Il secoua la tête:
— Pas comme ça.
Il poussa les plateaux sur le coté et m'attira plus près pour le faire lui-même. Mes joues s'enflammèrent sans que je leur en donne l'ordre, je détournai les yeux en espérant qu'il ne le remarque pas.
— Voilà, dit-il quand il s'estima satisfait.
Calmer les battements mon coeur fut plus difficile que jamais.
Après les cours, Liam partit de son coté pour aller chercher sa petite soeur et je rentrai avec Alice, une idée en tête. J'attendis que ma soeur soit dans sa chambre pour appeler Mme Miller. Elle me répondit après deux tonalités crachotantes:
— Allo ?
— Allo, M-Mme M-M-Miller ?
— Oui, c'est moi. Comment ça va, Luke ? Me demanda t-elle gentiment.
— B-Bien, et v-vous ?
— J'ai vu des jours meilleurs... Qu'est-ce qu'il a fait ? Soupira t-elle.
Je fronçai les sourcils, perdu.
— C-Comment ç-ça ?
— Tu ne m’appelles que lorsque Liam a un problème, j'ai pensé...
— Hm... N-Non. Je v-voulais sav-voir si on p-p-pouvait se v-voir pour p-p-parler de quelq-que chose ?
Silence à l'autre bout du téléphone, comme si elle était surprise.
— Oui, d'accord... On pourrait se retrouver au Silver ? Tu sais où c'est ?
— Oui, je s-sais.
C'était le bar où Tania et moi avions eut notre premier rendez-vous.
— Je me mets en route, je peux y être dans cinq minutes.
— A t-tout de s-suite.
Mon sac sur le dos, je repris la route. Le Silver était toujours le même, calme, tranquille. Je m'installais face à la porte et commandais deux menthe à l'eau. La situation était cruellement familière mais je ne me sentis pas triste. Ma relation avec Tania n'avait été que superficielle, je n'avais pas eut le temps de m'attacher vraiment et d'être blessé par sa trahison. Mon égo en avait prit un coup, ma fierté. Mais rien d'irréparable.
Mme Miller arriva deux minutes plus tard, comme elle l'avait promis. Elle me sourit, me fit la bise, me remercia pour la boisson et s'assit. Ses yeux tombèrent sur la cravate toujours autour de mon cou mais elle ne pipa mot, se contenta de sourire.
— Alors, Luke... Tu m'as convoqué ? Plaisanta t-elle.
Je pris une gorgée pour me donner une contenance, reniflai avec amusement. Son sourire s'atténua, ses épaules s'affaissèrent:
— Il n'a rien fait de mal, pas vrai ? Tu me le dirais ?
— Il n'a r-r-rien fait, la rassurai-je. Je v-voulais vous p-p-parler du voyag-ge en anglet-terre...
— Je lui ai dit non, dit-elle fermement. S'il pense que t'envoyer va me faire changer d'avis...
— Ce n'est p-p-pas lui qui m-m-m'envoie, je m-me suis env-voyé tout s-seul.
Mme Miller se pencha sur la table et baissa d'un ton en regardant autour d'elle pour être sûre que personne ne nous écoutait:
— Il vole des choses. Il ment, il pique des crises ou il est complétement léthargique. C'est un véritable enfer ! Il est sous traitement, je sais que ça explique la plupart de ses colères mais je ne peux pas faire comme si voler ce n'était rien !
— Je s-sais mais M-Madame... C-C-Ce qu'il v-vole n'a auc-cune valeur !
Elle cligna des yeux et m'observa comme si j'étais devenu fou.
— Tu sais qu'il vole ?
— Oui, je s-sais. Il n'est p-p-pas discret.
— Oh mon dieu, dit-elle en rougissant, morte de honte.
— Madame M-M-Miller, il ne m-m'a prit q-q-que des c-choses stupid-des ! Un t-tee-shirt, une p-p-pince, un b-bouton, un cray-yon, alors q-qu'il y a d-d-des choses q-qui ont b-beaucoup p-p-plus de valeur c-chez moi !
— Mais je me fiche que ça ait de la valeur ou pas !
L'impatience me fit me pencher sur la table à mon tour:
— Écout-tez, il ne v-v-vole pas d-dans les magas-sins, dans l-les boutiq-ques ou autre. Il est h-honnête et c-c-c'est mon am-mi. Si ça m-me dérang-geait, ça fait l-longtemps q-q-que je le lui aur-rais dit. Mais c-ce n'est p-p-pas le cas.
— Ça ne te dérange pas ? Demanda t-elle suspicieusement.
— Non.
Le contraire. J'aimais savoir qu'il avait certaine de mes affaires, les voir avec me faisait sourire. Mme Miller secoua la tête, incrédule:
— Soit tu es un bon ami, soit un bon pigeon.
— Le p-premier, j'espère.
Elle soupira et but sa menthe à l'eau d'une seule traite avant de s'amuser à faire le tour du verre avec son index.
— Tu sais, je n'ai aucune idée de ce que je fais. Ca faisait tellement longtemps qu'on ne s'était pas vu... Je ne le connais pas. J'essaye, mais ce qu'il a vécu...
Elle déglutit, les larmes aux yeux.
— Je l'ai abandonné, dit-elle d'une petite voix. Je suis partie quand j'ai rencontré Gordon parce que j'étais amoureuse mais surtout parce que je ne supportais plus son père et j'ai... J'ai été aveugle.
Une larme roula sur sa joue, elle l'effaça rapidement. Je baissai les yeux et m'occupai les mains avec la serviette en papier, gêné par ses émotions et par les miennes.
— Il n'a même pas insisté quand je lui ai dit "non", soupira t-elle, revenant à notre sujet de conversation. Mais même si je disais oui, comment ça se passerait ? Il a des médicaments à prendre, il se réveille en hurlant la nuit et les crises, Luke, les crises..., soupira t-elle en enfouissant sa tête dans ses mains, épuisée.
— Je p-p-pense que v-vous devriez l-le laisser p-p-partir. Peut-être q-q-que chang-ger de d-décor lui fera du b-b-bien et je s-suis sûr q-que si vous exp-pliquez la s-situation il n'y aur-ra pas de p-p-problème. On d-doit se mettre p-p-par paire p-pour être p-placé chez une f-famille, je me m-mettrai avec lui, je f-ferai att-tention à ce q-q-qu'il prenne ses c-cachets...
— Et les séances de psychanalyse ? Intervint-elle.
— D-Deux semaines, lui rappelai-je avec un sourire. Il n-ne loupera q-q-que deux s-séances. Et p-p-puis ça vous p-permettrait de s-souffler de v-votre coté.
Mme Miller se perdit un instant dans ses pensées, un silence tranquille tomba entre nous. Je pouvais presque voir les rouages de son cerveau tourner, évaluer les risques, se projeter dans l'avenir...
— Tu me passera quelques coups de fil ? Parce qu'il ne le fera pas.
— Oui, souris-je.
Elle me rendit mon sourire et me dévisagea. Ses yeux se posèrent de nouveau sur la cravate:
— Elle te va bien.
— Liam m-m'a expliq-qué.
— Gordon a un stock complet de cravates de ce genre là. Celle-là est sûrement la moins extravagante, c'est comme ça qu'il m'a eut, avec ses stupides cravates, dit-il, un rire coincée dans la gorge. Je ne savais pas qu'il voulait te l'offrir.
Je fronçai les sourcils et secouai la tête. Elle se trompait, ce n'était pas ça du tout...
— Il n-n'avait p-p-pas l'intent-tion de me l-l'offrir au d-début..., la corrigeai-je.
— Oh mon chéri, souffla t-elle, un sourire tendre au coin des lèvres. Elle est de la même couleur que tes yeux.
Je baissai les yeux et caressai le tissus bleu roi pensivement. Au comptoir, la station de radio passa Don't get your hopes up de Dntel.
A suivre...
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Sujet: Original - pas de spoil - Les deux L (17) 
Dim 13 Déc - 16:12
