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[Les 100 - UA] Le prince et l'assassin (chapitre 13)

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Maliae
Maliae
Piou piou piou piou piou piou piou piou piou piou
Messages : 1927
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MessageSujet: [Les 100 - UA] Le prince et l'assassin (chapitre 13) [Les 100 - UA] Le prince et l'assassin (chapitre 13) Icon_minitimeSam 10 Fév - 23:07

Note : Pas relu, jonty, ce chapitre c'est n'imp'

***

13. Marionnette.

Enfermé dans le noir, il fallait que je trouve une occupation pour tenter de faire comme si tout était normal, comme si tout allait bien.
La première chose que je fis c’est tenté de me débarrasser de la corde qui me liait les mains. Je n’avais même pas essayé de l’enlever depuis le temps qu’elle m’arrachait la peau, je me disais que cela serait inutile puisque Pike ou ma mère m’attacherait de nouveau les mains presque immédiatement. Je ne m’étais pas rendu compte qu’à force de retenir mes poignets pendant plusieurs jours où je m’étais pas mal dépensé, la corde avait finit par un peu se détendre. Il ne me fallut pas longtemps en bougeant mes mains pour en venir à bout et me délivrer. Je regrettai d’y être allé si vite, mais je le vécu un peu comme une victoire, j’avais réussi à me libérer d’une de mes chaînes. Je massai mes poignets meurtris et bougeai longuement les bras pour y faire circuler convenablement le sang. Ensuite je fis quelques exercices physiques, tels que des pompes ou des abdos. Tant que je me concentrais sur ces simples tâches, je pouvais faire semblant. Je pouvais par exemple m’imaginer au château, non loin de Jasper. Me dire que les ténèbres n’étaient dû qu’à la nuit et à une étrange pénurie de bougies. Si je criais, le prince viendrait, et il ferait bientôt jour.
Au bout d’un moment, je fis le tour de la pièce. Elle n’avait pas vraiment changé, mais paraissait plus petite que dans mes souvenirs. Le lit était donc si prêt du canapé et de la cheminée ? Les cloisons étaient donc si rapprochés ? Laissant mes doigts se balader sur les murs, je sentis une aspérité, ici il n’y avait plus de papiers peints, mais juste de la pierre. Je me souvins alors pourquoi il n’y avait pas de fenêtre, ma mère l’avait fait murer tout exprès. Hannah était trop bonne, elle pensait à tout pour son fils chéri.
Je découvris un seul changement, plus tard, quand on m’apporta à manger. J’avais pensé profiter de l’arrivé de mon plateau repas pour tenter de fuir cette pièce, j’étais plus fort que ma mère, Pike et le domestique, il serait assez simple pour moi de me défendre et de sortir. Une fois à l’air libre, je prendrais le premier cheval pour retourner au château, et tant pis si cela déplaisait à ma mère. J’étais prêt à prendre le risque de la décevoir, tant que je ne restais pas ici. Plus tard je mettrais mon plan à exécution et tuerais Jasper pour lui prouver qu’elle n’avait pas besoin de m’enfermer dans le noir pour que j’ai envie d’obtenir vengeance. J’avais tout prévu, je me tenais déjà prêt quand j’entendis les bruits de pas se rapprochant de la chambre. M’attendait alors une surprise de taille. Sans doute pendant que je m’entrainais sur le parcours, Hannah en avait profité pour apporter quelques modifications à la porte. Je n’avais pas remarqué ses absences, parce que j’étais trop occupé à ramper dans la boue et courir comme un idiot autour de rondins de bois. Elle avait peut-être reçu l’aide du domestique, je l’ignorais. En tout cas, on passa mon plateau par une trappe construite dans la porte que l’on referma aussi sec. Mes espoirs de fuite venaient de s’envoler.
Je sentis mes jambes flancher. Je m’assis par terre, sans aller prendre mon plateau. J’allais rester enfermé ici.

D’abord je réagis avec passivité, je me couchai sur le lit et passai du temps à dormir, malgré les cauchemars qui m’envahirent. Une forêt avec une bête sauvage par moment, une chambre noire le plus souvent. J’étais enfermé dans la même chambre que maintenant, jusque dans mes rêves. Je compris assez rapidement que dormir n’était donc pas la solution. Je me mis à tourner en rond dans la pièce. Du lit jusqu’au mur, du fauteuil jusqu’à la cheminé, puis jusqu’à la porte. Et c’était reparti. Lit mur fauteuil cheminé porte. Parfois je faisais le tour à l’envers. Lit porte cheminé fauteuil mur. Ou bien je traversais la pièce d’une autre façon. Lit cheminé fauteuil porte mur. Mur fauteuil porte cheminé lit. Plus j’avançais dans cet endroit étriqué, plus je sentais l’énervement me gagner. Mes pas étaient plus lourds, mes poings serrés, en atteignant pour la énième fois la porte, je sentis le barrage à l’intérieur de moi craquer et je me jetai contre elle. Cette fois-ci la colère me gagnait, une rage folle et destructrice. Je cognai avec mes poings contre le bois, et je me mis à crier. Comme je le faisais sur la plage avec Jasper, comme il m’avait appris. Un cri bestial et sans contrôle. Si on ne m’ouvrait pas, je défoncerais cette porte. Je la briserais et je sortirais par moi-même. Je ne resterais pas une minute de plus enfermé dans le noir à recevoir des plateaux repas, jusqu’à ce que ma mère décide de me faire sortir. Je frappai et frappai et frappai encore. Utilisant toute ma force, toute ma rage. Je continuai jusqu’à entendre ma mère derrière la cloison :
- Continue ainsi Monty et je remplace la porte par des briques.
- Vous ne feriez pas ça, vous avez trop besoin de moi.
- Je le ferai et quand tu seras prêt à sortir il me suffira de casser le mur.
- Je suis prêt à sortir, dis-je.
- À la façon dont tu me parles et dont tu frappes à la porte, j’en déduis que tu me mens. Tu n’es pas prêt.
- Qu’attendez-vous de moi ?
- J’attends que tu remplisses ta mission.
- Je la remplirai, promis-je, laissez-moi sortir.
- Non. Tu vas rester là jusqu’à ce que je sois sûre de toi.
- Et quand serez-vous sûre ?
- Tu le sauras quand tu sortiras.
J’avais l’impression que je ne sortirais jamais.

Les jours se transformèrent en semaines. Après avoir fait des milliers de fois le tour de la pièce, je me contentai de rester allongé sur le tapis, les bras et les jambes écartés. Je chantai. Je comptai. Je ne voyais plus rien. Je me repaissais des bruits de souris de la personne qui m’emmenait mes repas. Je me nourrissais d’entendre le bois qui craque. Quand ma mère venait me parler, et elle venait me parler, j’avais l’impression d’être heureux et quand elle repartait c’était comme une déchirure.
Je ne sais pas à quel moment je me suis mis à faire comme si je discutais avec le prince, seul sur mon tapis, j’avais un monologue avec Jasper. Bien sûr, il ne me répondait pas mais je pouvais l’imaginer hocher la tête, me sourire.
- J’espère que tu n’as pas perdu ma gourmette, mais te connaissant tu dois en prendre soin et faire bien attention de ne pas l’abîmer, j’espère quand même que tu n’as pas arrêté de te servir de ton bras pour protéger la gourmette. C’est ce genre de choses totalement idiotes que tu es capable de faire. Je me demande si ton travail de prince te prend du temps, si cela t’embête toujours autant, est-ce que ton père est déjà reparti et t’a laissé complètement seul ? Qui est le garde qui te suit partout ? Est-ce que tu penses à moi ? Est-ce que je te manque ? Est-ce que tu m’as déjà oublié au profit de toutes ces filles que tu embrasses ?
- À qui est-ce que tu parles ?
Je sursautai. Hannah. Je ne l’avais pas entendu arriver. Ce n’était pas que je devenais sourd pourtant, simplement j’avais de moins en moins de repère. Quand j’étais petite, ma mère me faisait sortir une fois par semaine environ, et cela me permettait de me ressourcer durant quelques minutes, de pas devenir complètement dingue. Là je n’étais jamais sorti. Tout comme les repas, pour changer mon seau, je l’avais passé par la trappe et on l’avait nettoyé pour me le rendre. J’étais emmuré vivant, quand bien même il y avait une porte.
- À personne, dis-je. Je fais du bruit, c’est tout.
- Tu parles au prince, n’est-ce pas ? Devina-t-elle quand même.
Mon silence fut une réponse suffisante pour elle.
- Alors tu ne mérites pas de sortir.
Mon estomac se tordit.
- Tu penses que Jasper va venir te sauver ?
Je ne le pensais pas, mais sans mentir, je l’espérais quand même.
- Il ne viendra pas, ajouta-t-elle. Son père a tué le tien et il s’amuse avec toi, tu ne le vois même pas.
Je secouai la tête, ce n’était pas le genre de Jasper.
- Tu crois qu’il vaut mieux que son père ? Tu crois que dans son château bien à l’abris, il pense à toi ? Il s’inquiète pour toi ? Tu crois tout ça ? Tu es stupide Monty. Pour lui tu n’es pas mieux qu’un chien de garde. Il t’a déjà oublié. Il ne viendra pas te sauver. Il ne viendra jamais pour toi. Il ne lèvera pas le petit doigt pour toi. Jamais.
Je savais que ce n’était pas vrai. Je ne la croyais pas. Je ne voulais pas la croire. Parce que je connaissais bien Jasper. Il n’était pas comme ça. Il prenait soin des autres et c’était sincère. Je le connaissais assez pour le savoir.
Ce qu’elle me disait, ce n’était pas la vérité.
Mais elle me répéta les mêmes choses jour après jour après jour après jour. Elle me dit même que si j’étais là, enfermé dans cette pièce, ce n’était pas sa faute à elle, mais bien celle du père de Jasper. S’il n’avait pas tué mon père, on en serait jamais arrivé là. Si mon père était vivant, je serais prince d’Arkadia, heureux et fier. Je ne serais pas ce moins que rien bloqué dans cet endroit sans lumière.
Et plus elle distillait son poison et plus je finissais par la croire, parce que je n’en pouvais plus, parce que j’étais prêt à tout gober tant qu’elle me laissait sortir d’ici. Elle éteignit petit à petit mon espoir de voir le prince arriver, et puisqu’il ne venait pas, Hannah avait sans doute raison depuis le début.
Jasper ne m’avait jamais apprécié, il se servait uniquement de moi. Tout ce que j’avais à faire c’était devenir son héritier et me débarrasser de lui. C’était déjà ce que j’avais prévu de toute façon, je n’avais qu’à accélérer les choses, Hannah serait contente, je serais vengé, nous aurions enfin le pouvoir.
Quand ma mère repartait, je me retrouvais à nouveau seul et désemparé, j’aurais voulu qu’elle continue de me dire pourquoi je devais me venger, qu’elle me répète combien Jasper se foutait de moi, qu’elle me raconte encore comment son père avait tué le mien. Pendant son absence, l’obscurité m’engloutissait et j’avais l’impression de disparaître, de m’effacer, j’avais l’impression qu’on m’oubliait. Jasper m’avait déjà oublié depuis longtemps.
J’avais réussi à subtiliser un couteau de mon plateau repas, et je grattais entre les briques de la fenêtre murée, je voulais simplement un rayon de lumière, un seul, être sûr que le soleil existait toujours. Je passais mon temps à gratter, je ne faisais plus rien d’autre. Je dormais à peine parce que dormir était pire. Je mangeais pas beaucoup plus, je n’avais pas faim de nourriture mais faim de lumière. Il n’y avait que quand ma mère arrivait, que je cessais de gratter pour l’écouter, l’oreille collée à la porte et j’avalais ses paroles comme si elle s’était transformée en divinité.
Je sentais la raison me quitter, j’aurais fait n’importe quoi pour pouvoir sortir, tuer Jasper ne me semblait être devenu qu’une formalité. Ma mère dût le sentir, elle dût comprendre que j’étais prêt à tout. Peut-être parce que je répétais tout ce qu’elle me disait avec conviction. Jasper ne vaut rien. Je vais le tuer mère. Je vais devenir son héritier très vite mère. Je ferai tout ce qu’il faudra mère. Je ferai tout ce que vous voudrai mère.
Tout ce qu’elle voudrait.
Avant d’ouvrir la porte, elle me demanda de ne pas tenter de fuir et je restai sage comme elle me l’avait ordonné. Pourtant la liberté était là à quelques mètres, il suffisait que je la pousse et que je cours, mais j’étais complètement sous son contrôle.
- Tu veux sortir de là n’est-ce pas ?
- Oui mère.
- Tu feras tout ce que je te demanderai ?
- Oui mère.
- Tu redeviendras un fils bien obéissant ?
- Oui mère.
Sa main s’abattit sur mon épaule et je me laissai soumettre. Hannah fit venir le domestique dans la pièce. Puis cruellement, elle me réclama de lui casser le bras. Sans explication, sans justification. Je ne posai aucune question, sans laisser le temps au serviteur de se plaindre ou de s’enfuir, je l’attrapai fermement et lui brisai l’os de l’avant-bras. Je restai indifférent à ses cris tandis que ma mère hochait la tête avec satisfaction.
Elle congédia le domestique sans se préoccuper de son bras et attrapa mon menton entre ses mains :
- Fais toujours ce que je te dis désormais, où tu sais ce qui t’attendra.
- Oui mère.
Elle referma la porte sur moi et je m’écroulai sur le sol en me rendant compte que j’étais toujours enfermé.

Monty, qui était Monty, y avait-il jamais eu un Monty ? Je ne savais plus. J’avais cessé de gratter dans le mur, cessé de manger, cessé de boire, cessé de tout. Peut-être que j’étais déjà mort sur le tapis. Je n’en savais rien, il faisait tellement noir, tellement sombre et je me sentais tellement vide. Il faisait froid sans feu de cheminée, mais ça m’était égal ça aussi. Le froid, la faim. Sans lumière j’avais l’impression que plus rien ne comptait. *
Quand la porte s’ouvrit à nouveau je ne réagis pas. Ma mère me demanda de me lever et je le fis, telle une marionnette dont elle tirait les ficelles.
- Allez viens, me dit-elle.
Je retrouvai la lumière du jour et je me sentis tellement aveuglé que je fermai les paupières.
- Va te laver et te changer, m’ordonna-t-elle.
Il fallut qu’elle me guide jusqu’à ma chambre, parce que j’étais incapable de rouvrir les yeux. Je me lavai à tâtons, je me vêtis. Je sentais la lumière sur mon visage sans la voir et c’était agréable. Une fois propre et changé, je dû manger. On me fit assoir à table et les paupières closes je me sustentai sous les ordres de ma mère.
- C’est ridicule Monty, ouvre les yeux.
Une nouvelle fois j’obéis et la lumière du jour me brula la rétine. Par chance elle n’était pas si forte, il faisait gris dehors, cela aurait pu être pire. Je sentis des larmes me monter aux yeux, mais je m’évertuai à les garder ouverts, plus pour ne pas déplaire à ma mère que pour les réhabituer à la luminosité. J’étais enfin sorti de cette pièce murée, froide et noire, pourtant je ne retrouvais aucune volonté, aucune envie. J’avais l’impression d’avoir laissé mon âme quelque part là-bas, entre le fauteuil et la cheminée.
Le domestique à qui j’avais cassé le bras avait pris ses congés et était parti, il n’était pas sûr de retrouver un emploi, et très certainement qu’il ne retrouverait pas un emploi aussi prestigieux que celui-ci, mais il avait trop peur de nous pour nous raccompagner au château. Je soupçonnais ma mère de l’avoir fait exprès. Les domestiques, c’est bavard, elle ne voulait pas que celui-ci parle, et à dire vrai je m’en fichais.
Mes yeux finirent par s’habituer à nouveau à la lumière du jour. Pour me tester, ma mère ne cessait de me donner toutes sortes d’ordres un peu absurde. Assied toi sur ce canapé, lis ce livre, récite-moi un passage par cœur, va dehors et cours, marche, trottine. Elle m’aurait demandé de me mettre à genoux et d’aboyer, je l’aurais fait.
Le soir j’allumai plusieurs bougies près de mon lit, de peur que la nuit ne m’engloutisse à nouveau. Ma mère me demanda de les éteindre et j’obéis, quand bien même la peur me tirailla l’estomac.
Avant que nous retournions au château, ma mère me rappela ce que je devais faire pour la millième fois. Je devais devenir l’héritier du prince le plus rapidement possible, puis le tuer. Nous venger. Récupérer le pouvoir. Je savais tout ça, je le savais jusqu’à l’écœurement, et je lui obéirais, je ferais tout ce qu’elle voulait, tout ce qu’elle me demanderait. J’en finirais une bonne fois pour toute avec tout ça.

Je ne saluai pas Pike lors de notre départ, j’espérais ne jamais le revoir, tout comme notre maison. Je ne voulais plus rien à voir à faire avec eux. Désormais je ne ferais que ce que ma mère me dirait et ce serait tout. Presque trois mois étaient passés depuis notre départ, Hannah me l’avait dit, il faisait de plus en plus froid et le trajet du retour se fit sous une pluie verglaçante plutôt désagréable qui ralentit beaucoup les chevaux. Arrivé au château, le temps n’était pas meilleur et nous courûmes nous abriter dans le grand hall, à l’intérieur. Le roi était reparti et nous fûmes accueillis par l’intendante et d’autres domestiques. Jasper n’était pas là, selon les serviteurs il avait beaucoup bu et dormait toujours. Je sentis la colère monter en moi quand je compris combien ma mère avait eu raison à son propos. Il se moquait de moi, il m’avait déjà oublié, pendant mon absence il s’était simplement amusé à boire et à rencontrer des filles, comme il le faisait d’habitude. Il n’était même pas là pour m’accueillir, même pas là pour me voir et s’assurer que j’allais bien.
Mais qu’est-ce que j’espérais au fond ? Jasper n’était jamais venu me sauver, il ne le ferait jamais, ce n’était qu’un prince stupide qui préférait s’amuser plutôt que penser à ses amis. J’avais souffert à cause de lui, parce que tout était de sa faute. Mais j’avais retrouvé la raison, je savais désormais ce que je devais faire, et je le ferais sans plus me perdre en route.

Lorsque le prince se leva, j’étais en train de prendre le thé avec ma mère. Il nous salua cordialement mais d’une mine plutôt fatiguée et s’assit près de moi.
- Comment se sont passé tes vacances ? Me demanda-t-il.
- Disons qu’elles étaient très instructives, répondis-je.
- Tu t’instruits même quand tu pars te reposer ?
Je ne répondis pas à sa remarque. Hannah nous observa tous les deux et je fis bien attention de ne pas paraître trop familier avec le prince. Je donnais des réponses courtes à ses questions, j’agissais plutôt froidement et de façon lointaine. Ce qui n’était pas si difficile, puisque je ne me sentais pas vraiment là, pas vraiment dans ce château. Ma mère tirait les ficelles de mon corps, tandis que mon esprit était perdu dans les ténèbres. Une petite part de moi avait sans doute désiré que Jasper me ramène, qu’il m’accueille comme il se doit, qu’il fasse ou dise quelque chose qui change tout.
À la place il avait été absent, et maintenant il me parlait à travers sa fatigue et ses maux de crânes, qu’il devait à l’alcool qu’il avait ingurgité pendant mon absence. Je le détestai d’être si formel et toute espérance fut étouffée directement dans son cocon.
Quand ma mère se leva, je me levai à mon tour et l’accompagnai jusque dans ma chambre. Elle me répéta ce que je devais faire et j’acquiesçai à tout ce qu’elle me disait.
Les prochaines heures, je ne vis jamais Jasper seul, j’étais toujours avec Hannah et elle s’assurait que je me tienne tranquille. Le prince avait l’air agacé, mais je ne fis rien pour le voir en tête à tête.
- Tu es mon garde du corps, finit-il par me dire le lendemain, tu dois me suivre partout et donc comme je vais sortir, tu dois venir avec moi.
- N’as-tu pas trouvé un autre garde du corps durant mon absence ?
- Tu sais que personne n’est aussi fort que toi et que c’est ton rôle.
- Hannah avait raison, dis-je, je suis simplement un rôle pour toi.
- Ce n’est pas ce que je dis, s’énerva le prince, je veux simplement te voir seul à seul.
- Et qui y-a-t-il de si important que ma mère ne puisse l’entendre ?
- Et depuis quand es-tu devenu l’ombre de ta mère ?
Hannah se leva :
- Je ne tolérerai pas que tu parles ainsi de moi, peu importe que tu sois le prince.
- Je ne parlais pas de toi, lui rétorqua Jasper, mais de ton fils.
- Mon fils fait ce que je lui dis.
Jasper me transperça des yeux et murmura :
- Moi qui croyais que tu avais appris à penser par toi-même.
Sur ces mots il se leva et s’éloigna. Je restai sur ma chaise, ma mère ne me donnant pas la permission de le suivre. Cela m’était égal ce qu’il pensait. Il s’était simplement servi de moi, il m’avait vite laissé tomber quand je n’étais pas là, il préférait boire et s’amuser plutôt que venir m’accueillir. Alors pourquoi l’aurais-je écouté ? Tout ce que je devais faire c’était devenir son héritier et le tuer.
Jasper revint à la charge lors du repas du soir. Habituellement Hannah ne mangeait pas avec nous, désormais si. Cela me donna une idée :
- Tu veux que l’on se voit seul non ?
- Oui.
- Tu dois me donner quelque chose en échange, dis-je.
- À toi ou à ta mère ?
Je soupirai :
- Est-ce que tu veux me donner quelque chose, oui ou non ?
- Non. Répondit le prince.
Je fus surpris, je m’attendais à ce qu’il accepte, rien que pour me voir seul. Je pensais que ce serait simple et qu’il accepterait de faire de moi son héritier comme ça. À la place, il se leva :
- Je ne donnerai rien, ni à toi, ni à Hannah. Je n’ai pas besoin de te voir seul, puisque tu ne le désires pas.
Il se pencha vers moi et murmura à mon oreille :
- Je veux simplement que tu saches que si tu veux me voir, n’importe quand, je suis là.
Sur ces mots, il se leva :
- Je n’ai plus d’appétit, annonça-t-il
Et il s’en alla.
- Que t’a-t-il dit ? Demanda ma mère.
- Je n’ai pas compris, répondis-je.
Je plantai ma fourchette dans un morceau de viande et le mit dans ma bouche, pour ne pas avoir à parler plus longtemps.

Ma mère voulait que Jasper fasse de moi son héritier rapidement, sauf que Jasper ne passait plus de temps avec moi. Il nous donna pour raison qu’il était occupé. Je ne le détestai que davantage. Maintenant que j’étais de retour, il était occupé et ne pouvait plus me voir ? Ma mère soupira :
- Ça lui passera, il n’est jamais occupé longtemps, tu en profiteras pour faire ce que tu as à faire.
- Oui mère.
Je me demandais à quoi était occupé ce satané prince.
Pour ma part je passais mon temps avec ma mère. Pas question d’aller voir Alphard, c’était une perte de temps inutile, il aurait été ridicule d’aller m’occuper des fleurs, tout ce que j’avais à faire c’était répondre aux désirs de Hannah, quels qu’ils soient. Quand elle me réclama finalement de ne plus traîner dans ses pattes, j’allai m’asseoir sur un banc à l’extérieur, incapable de prendre aucune décision, incapable de savoir que faire.
Habituellement j’aidais Jasper dans son travail mais il m’avait dit que c’était inutile pour le moment, qu’il se débrouillerait seul, me faisant prendre conscience une fois de plus qu’il m’avait bel et bien mis de côté durant mon absence. Je finis par faire le tour du château, marchant sans aucun but, ne sachant où aller, ni quoi faire. Si ma mère ne me donnait pas d’ordre, si je ne pouvais pas approcher Jasper pour mener à bien mon plan, alors je n’étais qu’une marionnette vide sans objectif. À force de tourner en rond jusque tard, je surpris Jasper au détour d’un couloir, bien occupé avec Charlotte, ils se parlaient en étant très proches et rigolaient tout en se partageant une gourde qui devait sans doute contenir de l’alcool. Je me reculai pour me cacher derrière un mur, je n’avais pas envie que l’on me voit. Jasper buvait plus que Charlotte et riait plus fort qu’elle. Il s’amusait, lui au moins. Il ignorait tout de ce que j’avais vécu, de ce que j’avais subis, et il s’en moquait. Il ne posait pas de question, il ne venait pas avec moi, il était occupé ailleurs.
Occupé à boire avec une servante dans les couloirs du château. Je serrai les poings et fit demi-tour.
Quand avais-je réellement cru que Jasper était mon ami ? Mon meilleur ami ? Il n’était rien de tout ça. Depuis le début, il se servait de moi pour pouvoir aller où il voulait sans être accompagné d’autres gardes. Ma mère avait raison depuis le début. J’étais trop naïf. Un véritable idiot. J’avais hâte d’en finir avec tout ça. Il m’avait dit que si j’avais besoin de le voir, il serait là, je n’avais qu’à utiliser cette faille.
Je réussis à le voir seul, le lendemain matin en sortant de ma chambre.
- Il faut que je te parle, dis-je.
- Parle.
- J’ai une chose importante à te demander, quelque chose que j’aimerais que tu fasses pour moi.
- Que je fasse de toi, mon héritier, devina Jasper.
Je levai un sourcil étonné et Jasper se frotta le front, sans doute des restes de l’alcool qu’il avait bu la veille :
- Je sais que c’est ce que tu veux me demander. Laisse-moi du temps pour y réfléchir, d’accord ?
- Tu as besoin d’y réfléchir ?
- Étant donné ce qu’il s’est passé avec nos pères, oui.
Je ne pouvais plus rien dire après cette affirmation, alors je baissai la tête simplement.
- Tu n’aurais pas oublié quelque chose ? Demanda Jasper changeant de sujet.
- Quoi donc ?
- Et bien, qu’aujourd’hui c’est ton anniversaire, pour commencer.
Je relevai les yeux et ouvrit grand la bouche.
- Tu avais oublié, soupira Jasper.
- Oui.
- Heureusement que j’y pensais, je me suis occupé de tout durant ces derniers jours. J’ai commandé la meilleure nourriture et j’ai demandé à la cuisinière de te préparer tes plats préférés. Et pour préparer ton cadeau, c’est ce qui m’a pris le plus de temps. Je te le donne maintenant ou plus tard ?
Je ne sus que répondre et Jasper décida de me le donner plus tard. Il était tellement enthousiasme, il avait toujours tenu à ce qu’on fête mon anniversaire aussi bien que le mien. Et d’habitude, j’en étais très content, mais pas cette fois-ci.
- Je devrais rejoindre ma mère, dis-je.
Jasper eut l’air déçu mais je ne lui laissai pas le temps de me retenir et m’éloignai pour me rendre dans la chambre de Hannah. Je lui expliquai ce qu’avait fait Jasper et elle le traita d’idiot.
- Pourquoi fêter cette chose inutile ? Il ferait mieux de faire de toi son héritier.
- Je lui en ai parlé, dis-je, il a promis d’y réfléchir.
- Qu’il réfléchisse vite, si tu ne veux pas payer à sa place.
- Bien sûr, mère.
- Le mieux c’est que tu restes dans ma chambre aujourd’hui, annonça-t-elle, il est hors de question que tu participes à ces festivités.
- Oui mère.
J’obéis et m’assis sur le canapé. Quelques minutes plus tard, on frappa à la porte. Ma mère laissa entrer une servante qui annonça :
- Le prince attend Monty dans le salon.
- Dis-lui que Monty ne viendra pas, lui répondit ma mère.
La femme lui fit une courbette puis disparu. Quelques minutes plus tard elle revint :
- Le prince ordonne à Monty de venir dans le salon, où il le fera enfermé lui et vous dans les cachots.
Ma mère n’en crut pas un mot et refusa une nouvelle fois de me laisser aller. Dix minutes passèrent, jusqu’à ce que des gardes ouvrent la porte, rentrant eux-mêmes dans la pièce. Accompagné du prince.
- Au nom du prince d’Arkadia, je vous emmène tous les deux dans les cachots où vous resterez le temps d’être jugé pour désobéissance à la couronne.
Le garde attrapa Hannah qui s’énerva contre lui :
- Comment osez-vous poser vos sales mains sur moi, savez-vous au moins qui je suis ? Je vous ferai payer votre insolence !
Jasper entra dans la pièce et fit signe au garde d’emmener Hannah. Le deuxième garde voulu me maintenir également mais je ne me laissai pas faire et le mit à terre.
- C’est de l’abus de pouvoir, dis-je.
- Certes, fit le prince, mais j’en ai le pouvoir comme tu dis. Si tu ne souhaites pas fêter ton anniversaire, je veux que ce soit toi qui me le dises en personne. Alors cesses de te cacher dans la chambre de Hannah, et refuse mon invitation en bonne et due forme et pas comme un lâche.
- Je… Commençai-je.
- Je t’écoute.
Je soupirai.
- C’est ridicule Jasper, relâche ma mère.
- Elle est en partance pour les cachots, je pense qu’elle y aura une bonne place. Tant que tu n’auras pas refusé dans les formes, je ne la relâcherai pas.
Je regardai mes pieds. Hannah voulait que je refuse et j’obéissais à Hannah.
- Je refuse ton invitation, murmurai-je.
- Tu ne veux pas venir fêter ton anniversaire.
- Non je ne veux pas.
- C’est enregistré, fit Jasper. Je suis déçu, j’avais préparé tout cela pour toi, mais je comprends, je ne vais pas t’obliger.
Jasper sortit de la pièce en emmenant le garde avec lui et quelques secondes plus tard ma mère y rentra. Furieuse. Elle s’en prit à moi. Elle me gifla pour avoir laissé Jasper faire, puis elle me gifla encore parce qu’elle se sentait humilié. Je ne bougeai pas. Je ne lui proposai pas d’aller fêter mon anniversaire, je ne fis rien. Je me rassis simplement sur le canapé et j’attendis que la journée passe. Et elle passa. Longue et terriblement ennuyante. Ma mère resta avec moi, plus pour me surveiller qu’autre chose, et elle s’occupa de son côté, ne me demandant de rien faire à part d’attendre.
Elle ne me relâcha qu’à la nuit tombée et je retournai dans ma chambre avec une bougie. La lumière de la bougie était tremblotante mais elle me rassurait, je n’étais pas complètement plongé dans les ténèbres ainsi. Dans ma chambre j’avais demandé à ce qu’on m’apporte beaucoup de bougies, et je les allumais toutes à la nuit tombée depuis que j’étais de retour au château. Ma mère l’ignorait et ne me demandait pas de les souffler.
Je me couchai dans mon lit. Étrangement, ne rien faire m’avait épuisé et je m’endormis en un rien de temps, en oubliant de souffler mes bougies.

À suivre.
[Les 100 - UA] Le prince et l'assassin (chapitre 13)
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